Vers la radicalisation des enseignants

Alors que le chef de l’État Paul Biya a brandi une menace contre les enseignants grévistes lors de son discours à la nation, ceux ci semblent plus que jamais déterminés à poursuivre le mouvement de grève.

Les menaces de Paul Biya aux enseignants ont -elles poussé ceux-ci à se radicaliser? C’est en tout cas ce qui semble se dessiner. Dans son adresse à la nation Paul Biya avait déclaré sans ménagement. “Malgré les efforts du Gouvernement, la sérénité n’y est en effet pas complètement revenue.Pourtant, des efforts méritoires ont, de l’avis même des concernés, été consentis par le Gouvernement à cet égard.En dehors des nombreuses mesures de divers ordres qui ont été prises par les administrations concernées, plus de 72 milliards de francs CFA ont été débloqués en 2023 pour prendre en charge les dépenses y afférentes.Une provision complémentaire de 102 milliards de francs CFA a également été constituée dans le budget de l’Etat, au titre de l’exercice 2024, afin d’apurer les dépenses résiduelles”, avait déclaré Paul Biya , avant de hausser le ton.“Il sera dès lors difficilement admissible que l’éducation de nos enfants continue d’être prise en otage par une frange d’enseignants, dont les motivations réelles semblent s’écarter des objectifs affichés.Je voudrais être clair à cet égard. Autant je suis soucieux de voir les enseignants bénéficier des conditions appropriées pour l’exercice de leur noble métier, autant je suis intransigeant pour le respect du droit à l’éducation de notre jeunesse. Des mesures fermes vont à cet égard être prises pour veiller à ce que nos enfants ne se retrouvent pas victimes d’une éducation au rabais“.

Une menace à peine voilée qui n’a pas n’a cependant pas dissuadé les enseignants. Le Syndicat des enseignants du Cameroun pour l’Afrique (SECA) n’a pas tardé pour réagir au discours de fin d’année du président de la République Paul Biya.

Dans un communiqué du syndicat en date du 1er janvier 2024, « les enseignants sont invités à faire la semaine généreuse du mois de janvier allant du 02 au 05 janvier 2024 ». Cela implique la reprise effective et normale des enseignements et autres activités pédagogiques. Le SECA, après avoir rappelé les six revendications des seigneurs de la craie, dit avoir suivi avec attention le discours du chef de l’Etat du 31 décembre 2023, mais reste ferme sur ses positions.

En plus de ce communiqué certains enseignants envisagent de faire bloc derrière un candidat de l’opposition dont l’identité reste encore méconnue.

Et sur le terrain, les enseignants ont décidé eux-mêmes de ne pas rejoindre les classes. Au lycée de Ngoumou par exemple dans le département de la Mefou et Akono, région du Centre. On compte au bout des doigts les enseignants qui ont rejoint les salles de classe. ” La menace du président a été très mal été perçue par plusieurs enseignants du coup on est décidé de mourir pour nos droits”, a expliqué un enseignant.
Pour le chercheur en sciences politiques, Aristide Mono, “cette grève persiste parce que jusque-là l’État ne fait pas preuve de bonne foi dans la résolution du problème”.

Selon lui, dans le contentement des différentes revendications posées par les enseignants en lieu et place d’une réponse idéale, l’État se lance plutôt dans une “certaine arrogance qui se manifeste par des intimidations et des menaces”.

Si le gouvernement a apporté des débuts de solutions à la crise, en déployant des ressources financières, les enseignants restent sur leur soif. Ils attendent qu’au moins le texte signé en 2000, qui devrait améliorer la situation des enseignants soit mis en application. « Ce texte-là, qui défend le statut particulier des enseignants, renferme beaucoup d’avantages, dont nous ne jouissons pas et cela nous empêche de vivre de façon décente et de travailler dans de bonnes conditions », avait indiqué Olen Jeudong, un des leaders du syndicat.


Depuis plus de deux ans,les mouvements de grève ont été lancé à travers une opération « craie morte », dont l’objectif était d’attirer l’attention du gouvernement sur les revendications des enseignants.

Parmi ces réclamations figurent entre autres, le paiement des arriérés des 25 000 compléments de salaire et 90 000 avancements dans un bref délai (avec rappels y afférents), le paiement immédiat des rappels de 2/3 des enseignants pris en solde en décembre 2018 et oubliés lors du paiement des rappels y afférents, le calcul des rappels de 1/3 sur la base de 67 000 F Cfa et non sur la base de 58 000 F Cfa, et la suppression des taxes sur le calcul des rappels d’intégration. « Je suis à 4 ans de service, et toujours sur le régime de 2/3. Depuis 4 ans, je n’ai pas de complément de salaire, je n’ai pas reçu mon rappel, j’ai un avancement dont l’ordre n’a même jamais été signé, sans compter les frais financiers, et nous sommes nombreux dans notre cas », confie Alain Thom, l’un des initiateurs des mouvements de grève.

Joseph Essama

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