Incarcéré à la prison centrale de Kondengui pour deux affaires différentes, dont l’affaire du journaliste assassiné Martinez Zogo et pour propagation de fausses nouvelles, l’ancien reporter de Vision 4 a plaidé coupable dans le cadre de la deuxième affaire le concernant.
Sous escorte hautement sécurisée, Bruno Bidjang, le directeur des médias du Groupe l’Anecdote est arrivé hier au Tribunal militaire de Yaoundé. L’homme de main de Jean Pierre Amougou Belinga, le promoteur de ce média lui-même incarcéré à Kondengui, devait comparaitre devant le tribunal militaire dans le cadre de la première audience publique. Arrivé devant la barre et après son identification, le journaliste a dès l’entame de son procès plaidé coupable. L’affaire a été renvoyée au 11 avril prochain pour les réquisitions du Commissaire du gouvernement.
Mais avant cette date, le journaliste est attendu au Tribunal militaire de Yaoundé le 25 mars prochain dans le cadre d’une autre affaire, celle de l’assassinat de son confrère Martinez Zogo. Bruno Bidjang est accusé, dans cette autre affaire de complicité de conspiration de l’assassinat de son ancien confrère. Martinez Zogo tué le 17 janvier 2023, s’attaquait régulièrement à Jean Pierre Amougou Belinga, le patron du groupe l’Anecdote, l’accusant de corruption et de détournement au point où il s’était mis à dos, tout le groupe l’Anecdote.
Quelques jours avant l’enlèvement puis l’assassinat du journaliste, Bruno Bidjang avait fait un message qui était sans équivoque selon la justice. ” Quand on va agir, ça sera sans pitié”, avait écrit Bruno Bidjang. Quelques jours après, les assassins de Martinez Zogo ont été sans pitié pour lui. Dans son ordonnance de renvoi, le juge d’instruction du tribunal militaire pense donc que Bruno Bidjang avait été complice du projet d’assassinat du journaliste Martinez Zogo.
Une carrière d’affaires de crimes ?
Ce n’est pas la première fois que Bruno Bidjang est mêlé de façon très proche dans une affaire de crime.
Juin 2020, le jeune Bryan Fombor, connu dans la capitale Yaoundé pour son train de vie princier est froidement assassiné au quartier Omnisports à Yaoundé, après avoir reçu un coup de fil de Yvanna Essomba, l’épouse de Bruno Bidjang. Le jeune s’était rendu au quartier Omnisports sur invitation de Yvanna Essomba. Après avoir porté celle qu’il courtisait dans son véhicule, il est rattrapé quelques mètres après par des conducteurs de motos qui le poignardent à mort. Arrêtée Yvanna Essomba passera plusieurs semaines en exploitation dans les services de la police judiciaire. Pendant son exploitation la police découvre que Bruno Bidjang avait passé deux heures de temps au téléphone avec, celle qui deviendra quelques mois après son épouse. Bruno Bidjang est également arrêté et gardé à vue pendant plus d’une semaine.
Pendant le procès, un des jeunes arrêtés dans le cadre de l’assassinat de Bryan Fombor va déclarer au tribunal qu’ils ont été payé par la compagne de Bruno Bidjang pour ôter la vie à Bryan Fombor. Quelques semaines après ce jeune sera également tué dans sa prison.
« Un franc-tireur »
Inscrit plusieurs fois à l’école supérieure des sciences et techniques de l’information et de la communication (Esstic), Bruno Bidjang n’a jamais franchi le cap de la première année dans une école de journalisme ou encore moins dans l’enseignement supérieur. Par l’entremise de son père François Bikoro, lui-même ancien journaliste du groupe l’Anecdote, Bruno Bidjang a débuté sa carrière dans ce groupe de média, peu après le début des années 2010. Il y est resté jusqu’à son incarcération. Bruno Bidjang est devenu célèbre grâce aux multiples sanctions qu’il a écopé du Conseil National de la communication, le régulateur des médias au Cameroun. A plusieurs reprises, le reporter de Vision 4 a été suspendu par le régulateur pour faute professionnelle. C’est que le natif de Sangmelima a été plusieurs utilisé par son patron comme flingueur pour régler le compte des comptes aux personnes jugées gênantes, au mépris de l’éthique et la déontologie du journaliste.
Tenez, au plus profond de la crise entre Modeste Mopa, l’ancien directeur général des impôts et Jean Pierre Amougou Belinga, Bruno Bidjang a dans un reportage traité de “rat”, l’ancien patron de l’administration fiscale.
Avant cela, Bruno Bidjang réalise un reportage totalement à charge contre Ernest Obama, son parrain tombé en disgrâce. Il l’accuse d’être ” un jeune loup aux dents longues”, et d’avoir détourné plusieurs centaines de millions. Dans cette bande de plus de quatre minutes disponibles sur You tube, Bruno Bidjang n’a jamais daigné de recueillir la version de son ancien formateur incriminé. Pire il est allé jusqu’à montrer les images de ce dernier, pieds nus entre les mains de la Gendarmerie.
Dans son entreprise de tirs à gage, Bruno Bidjang n’a épargné personne. Après une attaque à Galim dans les régions anglophones du pays, Bruno Bidjang, sans le moindre recoupement charge l’opposant Maurice Kamto et accuse son parti, dans un reportage, d’avoir apporté du soutien matériel aux sécessionnistes terroristes qui ont attaqué Galim. Il affirme par ailleurs que cette attaque qui a fait plusieurs victimes, est le fruit de l’alliance entre le MRC, le parti de Maurice Kamto et la Brigade anti-sardinards(BAS), un mouvement clandestin qui revendique le depart de Paul Biya au pouvoir, mais qui s’oppose à la partition du pays.
Le même Bruno Bidjang n’a pas manqué de traiter la journaliste Mimi Mefo de sécessionniste alliée du MRC de Maurice Kamto. La faute de la journaliste aux yeux de Bruno Bidjang fut qu’elle a réalisé une interview avec Maurice Kamto pour le compte de DW pour laquelle elle travaille.
Fervent défenseur de la ligne 94
Pendant qu’il tirait à boulet rouge sur certains personnages, Bruno Bidjang a toujours été un fervent défenseur de certains caciques du régime accusé de détournements. Il fut l’un des journalistes qui ont le plus défendu le ministre des Finances Louis Paul Motaze, accusé de graves detournements. Il a mené le même combat en faveur de Sylvain Mvondo, présenté comme le fonctionnaire camerounais le plus riche et qui pilote la ligne budgétaire appelé ligne 94 et qui a fait perdre des centaines de milliards à l’Etat du Cameroun. Pour le politologue Simeon Ekodo Mveng, Bruno Bidjang est « le modèle de journalistes alimentaires promus par la force du décret identitaire et par le coup de pouce d’une élite ethno-tribale pour défendre le régime qu’ils considèrent comme Béti ».