Une scène dramatique s’est déroulée ce vendredi dans une église réveillée du quartier Akwa, à Douala, où une femme enceinte a perdu la vie après qu’un autoproclamé “prophète” ait interdit aux médecins de pratiquer une césarienne en urgence. Malgré les efforts du personnel soignant pour sauver l’enfant, la mère n’a pas survécu. Le prédicateur, lui, a pris la fuite, laissant derrière lui colère et incompréhension.
La victime, fidèle membre de cette communauté religieuse, assistait au culte dimanche dernier lorsqu’elle a été prise de violentes contractions. Rapidement conduite à la clinique Saint-Joseph d’Akwa, un centre gynéco-pédiatrique réputé, son état a nécessité une intervention médicale immédiate. Mais le “prophète” qui l’accompagnait s’y est farouchement opposé, exigeant que la délivrance se fasse “par la seule puissance de la prière”.
Selon des témoins, le praticien aurait insisté sur l’urgence vitale de l’opération, en vain. “Il a bloqué toute intervention, jurant que Dieu ferait un miracle”, raconte une source sous couvert d’anonymat. Les heures passant, l’état de la patiente s’est aggravé jusqu’à son décès. Le personnel médical a néanmoins réussi à extraire le nouveau-né vivant, une lueur d’espoir dans ce drame absurde.
Dès l’issue fatale connue, le prédicateur a disparu sans laisser de traces, alimentant la colère des proches de la défunte et des riverains. “Comment un homme peut-il se prendre pour Dieu au point de sacrifier une vie ?” s’indigne un voisin. Les fidèles de l’église, partagés entre stupeur et culpabilité, se demandent aujourd’hui comment un tel excès a pu se produire.
Cette affaire relance le débat sur l’influence des mouvements religieux radicaux au Cameroun, où certaines congrégations prônent le rejet de la médecine au profit de la foi. En 2022, un cas similaire à Yaoundé avait déjà défrayé la chronique après le décès d’un enfant dont les parents avaient refusé les vaccins pour des raisons spirituelles.
Quelles suites judiciaires ?
Les autorités locales doivent prendre en charge cette affaire, et ouvrir une enquête pour “homicide involontaire” et rechercher activement le fugitif. Me Paul Ngalle, avocat spécialisé en droit de la santé, rappelle que “personne ne peut s’opposer à un acte médical salvateur, au risque d’engager sa responsabilité pénale”. La clinique Saint-Joseph, de son côté, assure avoir tout tenté pour contourner l’obstacle religieux, mais se heurterait souvent à des pressions communautaires.
Alors que la famille pleure une mère disparue trop tôt, l’enfant, orphelin dès sa naissance, symbolise les conséquences tragiques de l’obscurantisme. Les appels se multiplient pour renforcer la régulation des églises et sensibiliser aux dangers du fanatisme.
À suivre.