Figure emblématique de la musique camerounaise, l’auteur, compositeur, interprète et soliste est décédée au petit matin de ce vendredi à l’Hôpital Fosh à Surenes en France, des suites de maladie.
Virtuose de la guitare et porteuse d’une voix mélodieuse, l’artiste Koko Ateba est morte ce vendredi en France. L’artiste septuagénaire a succombé à un cancer contre lequel elle a courageusement lutté depuis plus d’un an.
A l’annonce de son décès, ceux de sa génération qui l’ont connue lui ont rendu un vibrant hommage. « Koko Ateba était principalement connue pour sa maîtrise de la guitare acoustique, qu’elle utilisait pour accompagner sa voix distinctive et captivante. Sa musique mettait souvent en avant cet instrument, lui permettant de créer un son chaleureux et intime qui complétait ses thèmes lyriques. Bien que la guitare acoustique soit centrale dans sa musique, ses chansons incluaient parfois d’autres instruments traditionnels et contemporains pour enrichir le son et transmettre ses messages de manière efficace », a écrit le bâtonnier Maitre Akere Muna.

Musicienne emblématique, unique en son genre, Koko Ateba, fait ses premiers au Philanthrope, un club de Yaoundé. Elle y interprète des standards et se professionnalise rapidement au contact d’Ambroise Voundi, un ingénieur du son réputé et du musicien Sade Gide.
En 1982, Koko Ateba interprète la musique du film « L’amour des femmes » du réalisateur suisse Michel Soutter, composée par Patrick Juvet. Suit en 1986 l’album « Talk Talk » où elle s’illustre sur la scène nationale avec des titres comme « Yomeyel Ayop », « Nelson Mandela » ou « Taxi ». Le style épuré des duos piano/voix et sax/voix font merveille et l’installe sur la scène camerounaise.
Carrière brisée
Très inspirée par les faits de sociétés et la politique, Koko Ateba va subir les affres d’une carrière musicale engagée. Invitée à la présidence de la République en 1988, elle va commettre un « crime involontaire » d’offenser publiquement l’ancienne première dame Jeanne Irène Biya. En effet lors de sa prestation, Koko va interpréter son titre phare, «Atemengue», en compagnie de l’Orchestre National et à la demande du directeur de la soirée Ambroise Mbia. Cette chanson de l’air traditionnel Bulu évoque la stérilité féminine et le vol d’enfant. Son génie va froisser des susceptibilités au sein du pouvoir. La jeune chanteuse est jetée en prison et sortira deux mois plus tard. Plusieurs années après elle gardait toujours les souvenirs de cette aventure douloureuse. « J’étais une petite chanteuse qui se battait tant bien que mal au Cameroun pour exister. Alors on m’invite à chanter, et on avait prévu cette chanson, que j’ai répétée avec l’orchestre national au vu et au su de tout le monde. Les chansons avaient été imposées. Ambroise Mbia, le directeur de la soirée, m’avait demandé de préparer la troisième chanson après ma première prestation. Je reviens donc sur scène pour cette chanson-là. Le plus dur pour moi a été de ne pouvoir m’expliquer. On croit plutôt que je voulais faire du mal à quelqu’un au travers d’une chanson. Ça n’était pas mon objectif et surtout pas à une femme, par rapport à un problème de stérilité. Je trouve cela complètement aberrant », s’offusquait-elle.
Exil forcé
Après cette douloureuse épopée, Koko Ateba a dû quitter le Cameroun pour s’installer au Gabon, avant de s’envoler pour la France en 1990. Christine Bravo, animatrice sur France 2, la sollicite pour le générique de son émission « frou Frou ». La jeune camerounaise reprend pour l’occasion ce grand classique de la chanson française interprété précédemment par Line Renaud et Suzy Delair. Remise en selle par cette promotion inespérée, elle signe la même année le single « Frou frou » suivi de l’album éponyme, « Koko Ateba », sorti en 1993.

Une virtuose
En plus de sa guitare acoustique qui était centrale dans sa musique, ses chansons incluaient d’autres instruments traditionnels et contemporains pour enrichir le son et transmettre ses messages de manière efficace. Ses convictions politiques et sociales profondes étaient rares et inspirantes. À travers sa musique, elle chantait l’amour, l’unité, l’amitié et la solidarité. Elle plaidait avec passion pour un dialogue authentique comme solution aux crises dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun, témoigne Akere Muna.
Après 20 ans d’exil, Koko Ateba est revenue au Cameroun en 2010, lors des Cinquantenaires de l’indépendance et de la Réunification du Cameroun. En plus des prestations lors du cinquantenaire, elle refera plusieurs concerts privés.