Les autorités camerounaises étaient devant le Comité des Nations Unis contre la Torture. Le 13 novembre les officiels camerounais ont répondu des accusations de tortures, non-respect de la Convention contre la Torture et autres peines ou traitement cruels inhumains ou dégradants (UNCAT), formulées par plusieurs organisations de la société civile.
La 2159e réunion de la 81e session du Comité des nations unies contre la torture consacrée au Cameroun s’est penchée sur plusieurs manquements procéduraux au Cameroun. Parmi les entorses, les questions de garde à vue, l’accès au médecin, le jugement des civils devant les tribunaux militaires, ainsi que les sanctions prévues par la législation en cas de torture etc.
Sanctions inappropriées
Sur le cas de la torture, le Comité contre la torture a noté que le Nouveau Code Pénale de 2016 contient une définition de la torture qui est conforme à l’article 1 de la Convention contre la Torture et autres peines ou traitement cruels inhumains ou dégradants (UNCAT), mais que la sanction prévue par la loi ne sont pas appropriées. Car selon le comité, les sanctions prévues en cas de torture peuvent être assorties de sursis.
Le Comité s’est également dit préoccupé par le fait que selon les articles 90 et 91 du Code pénal, la peine pour un acte de torture peut être réduite à un an d’emprisonnement, si le tribunal reconnait les circonstances atténuantes. Pour le comité, « le Cameroun doit modifier son Code pénal afin de le mettre en conformité avec l’article 4 de la convention contre la Torture et autres peines ou traitement cruels inhumains ou dégradants (UNCAT) », a affirmé un responsable du Comité contre la Torture.
Jugement des civils devant les tribunaux militaires
Un point qui n’a pas échappé aux experts du Comité des Nations unies contre la torture, est le fait que le Cameroun continue de juger les civils devant les juridictions militaires. L’orateur a rappelé que le tribunal militaire au Cameroun a pour rôle de juger les infractions liées aux actes militaires, mais aussi pour les infractions qui affectent la sécurité de l’Etat. Le comité a dénoncé des compétences extrêmement larges et a demandé au Cameroun de respecter ses engagements à l’International.

« Le comité a noté qu’au moins 330 personnes sont condamnées à la peine de mort au Cameroun par des juridictions militaires, parfois sur la base des aveux obtenus par la torture. Le Cameroun doit modifier la loi afin de prévoir des délais raisonnables concernant la garde à vue pour des actes de terrorismes et supprimer la compétence des tribunaux militaires à juger des civils », a ajouté le même responsable.
Méthodes d’enquête
Le comité a apprécié le fait que l’Etat du Cameroun propose des enseignements sur les droits de l’homme dans les écoles de police, militaire, de magistrature et de l’administration pénitentiaire. Le comité a également apprécié le fait qu’un module sur l’interdiction, prévention et répression de la torture dans les écoles militaires et de gendarmerie. Les responsables de l’Onu ont affirmé que ce module transmet des connaissances spécialisées sur la responsabilité individuelle des auteurs, l’identification des victimes etc. Cependant le Comité a voulu savoir si ce module est obligatoire dans les écoles de formation et si les forces de défenses suivent les cours de mises à jour sur les questions des droits de l’homme.
La garde à vue défendue par les officiels camerounais
Les autorités camerounaises à cette cérémonie ont également pris la parole au cours de cette séance. Après une brève introduction de Salomon Ehet, représentant permanent du Cameroun auprès de l’Office des Nations Unis, Nsegbe Belombe Patrick, chargé d’études assistant à la direction des droits de l’homme et de la coopération internationale du ministère de la justice s’est prononcé.
Au sujet de la garde à vue le magistrat a expliqué qu’elle est règlementée par le nouveau Code de procédure pénale, expliquant que celle-ci est encadrée et ne peut être mise en œuvre que lorsqu’elle est prévue par la loi et les procédures judiciaires couvertes. Selon le magistrat, « le ministère de la justice met un accent particulier sur le respect des droits des personnes gardées à vue, lors de ses descentes annuelles dans les lieux de détention », a-t-il expliqué.

Il a ajouté que l’Etat du Cameroun a mis sur pied la commission d’indemnisation des personnes victimes des détentions et garde à vue illégale, qui est chargée d’indemniser les personnes dont les cas de détention ou de garde à vue ont été fait en contradiction avec la loi. Selon le magistrat, « cette commission a reçu 19 requêtes en 2023 et rendu 13 décisions. C’est ainsi que l’Etat du Cameroun a été condamné à payer 40 millions de FCFA à monsieur Sale pour détention illégale », a précisé Nsegbe Belombe Patrick.
Sur la question de la protection des défenseurs des droits de l’homme, l’Etat du Cameroun a expliqué que ceux-ci bénéficient de la protection de l’administration et des autorités. Et que les allégations sur la violation présumée de leur droit est en cours d’investigation.
Affaire Martinez Zogo
Les autorités camerounaises ont également été interpellés sur les affaires de Martinez Zogo, Paul Chouta et Longue Longue. Les officiels des Nations unis ont souhaité savoir ce qu’il en est de l’affaire Martinez Zogo et surtout si les coupables seront punis conformément à la loi.
A leur tour les organisations de la société civile se sont inquiétés de la Commission des Droits de l’Homme du Cameroun. Pour eux, cette commission ne joue pas pleinement son rôle. La suite des interventions est prévue des autorités camerounaises est prévue ce 14 novembre. Elle sera suivie des recommandations du Comité contre la torture.
Joseph Essama envoyé spécial aux Nations Unis à Genève