Arrivé au pouvoir le 6 novembre 1982 après la démission de son prédécesseur Ahmadou Ahidjo, Paul Biya a passé 41 ans au pouvoir. Entre corruption, népotisme et détournement, le Cameroun continue d’etre à la traîne en terme de développement.
Ce lundi 6 novembre, plusieurs manifestations ont été organisées dans les principales villes du Cameroun. Les alliés de Paul Biya n’ont pas dissimulé leur joie.
“Nous allons célébrer ce 41e anniversaire avec faste et solennité comme on sait bien le faire dans notre parti”, se réjouit Yoki Onana, le maire de la ville de Douala et délégué du parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC).
A l’inverse, pour l’opposition camerounaise, l’heure n’est pas à la fête mais à la réflexion et au recueillement. Pour Alexis Kamewe, président Europe du Social democratic front (SDF), 41 ans de Paul Biya au Cameroun, c’est une journée de deuil pour les militants du SDF. C’est une journée que nous ne commémorons pas. C’est une journée que nous prenons comme une journée de recueillement.”
A 90 ans, rien n’a encore été dit sur la succession de Biya, mais de plus en plus le sujet se parle déjà au sein de son parti. “le président Biya n’est pas éternel. Un jour, il devra partir. Parler de la succession n’est pas un tabou. Tout le monde y pense. Lui-même, je suis convaincu, y pense. Maintenant, il est question de savoir comment cette succession va se dérouler.”
Dans les rangs de l’opposition, “nous pensons que 2025 signera définitivement la fin du règne de Paul Biya que nous allons accompagner, comme il l’a dit lui-même, au village se reposer. Parce que 41 ans, c’est une vie”, note Alexis Kamewe, du SDF.
Pour Hilaire Kamga, analyste politique camerounais, estime que depuis 41 ans, Paul Biya gouverne son pays sans partage, grâce notamment au soutien de l’armée. Il explique que “Paul Biya est un homme qui a connu des situations paradoxales. II n’a pas connu une lutte pour l’opposition de manière claire. Il a hérité du pouvoir et n’a pas compris ce qu’est la compétition électorale fondamentalement. Il est finalement devenu un autocrate et structure sa pérennisation du pouvoir à travers une mise en condition de l’armée pour une meilleure protection de son pouvoir.”
Un bilan teinté, cependant, de sombres nuances. À commencer par la corruption du système Biya où les détournements de fonds publics, “le clientélisme, le favoritisme et le népotisme ont pignon sur rue”.
Quant aux “libertés individuelles et collectives, les signaux sont au rouge”, indique-t-on, citant le cas Maurice Kamto. Candidat malheureux à la présidentielle de 2018 dont il a contesté les résultats, cet opposant a été écroué, assigné à résidence, tandis qu’une centaine de ses partisans ont été détenus sans jugement. Tout cela “sous le regard indifférent voire complice des ‘hérauts’ de la démocratie.
Sur le plan économique “le Cameroun est l’un des poids lourds (économique) de la Communauté économique des États d’Afrique centrale (Ceeac). Même en termes de développement humain durable, le pays occupe un rang ridicule, 19e sur 54 pays africains”, note le quotidien ouagalais.
Si des générations entières de Camerounais n’ont connu qu’un seul président, un certain nombre d’entre eux espèrent désormais une alternance à la tête d’un Etat qui semble figé depuis quatre décennies.
Joseph Essama