La publication des résultats de la seconde phase du recrutement spécial d’enseignants dans les jeunes universités d’État de Garoua, Bertoua et Ngaoundéré a suscité une vive polémique. Des candidats issus des régions septentrionales du Cameroun, regroupés au sein du Collectif des titulaires du doctorat/Ph.D du Grand-Nord, ont annoncé une marche pacifique prévue pour le 21 février prochain à Ngaoundéré. Cette manifestation vise à exprimer leur « profonde et douloureuse indignation » face à ce qu’ils qualifient d’« injustices sociales inacceptables ».
Dans une lettre adressée au sous-préfet de Ngaoundéré 1er, les membres du collectif dénoncent un processus de recrutement qu’ils jugent biaisé. Selon eux, des fonctionnaires déjà en poste auraient été favorisés au détriment de candidats sans emploi, pourtant éligibles. « Des candidats ayant soutenu leur thèse deux jours avant la fermeture des dossiers ont été recrutés, tandis que d’autres, diplômés depuis cinq ans, ont été écartés », déplorent-ils. Ils pointent également du doigt le non-respect du principe d’équilibre régional, un pilier sacro-saint de la politique camerounaise.
La marche, qui partira du commissariat central de Ngaoundéré pour rejoindre les services du gouverneur en passant par la Place de l’Indépendance, est présentée comme un moyen pacifique de faire entendre leur voix. Au-delà de la protestation, les candidats recalés réclament la publication d’une liste additive pour corriger ce qu’ils considèrent comme une injustice flagrante.
Un problème récurrent
Les griefs exprimés par le Collectif des titulaires du doctorat/Ph.D du Grand-Nord ne sont pas isolés. Depuis plusieurs années, les recrutements dans les universités d’État du Cameroun sont régulièrement émaillés de controverses. Des candidats recalés dénoncent des pratiques opaques, des favoritismes et le non-respect des instructions du chef de l’État en matière d’équité et de transparence.
« Ces gens foulent au pied les instructions du chef de l’État à chaque fois », s’indigne un candidat recalé à l’université de Bertoua, sous couvert d’anonymat. « Nous étions huit dans notre filière, et jusqu’à la mi-janvier, je savais que j’étais dans la liste. Au final, mon nom a disparu. Je ne sais plus où mettre la tête. Nous autres, qui n’avons personne, ne serons donc jamais rien dans ce pays ? », se désole-t-il.
En 2020, une situation similaire avait conduit des candidats frustrés à occuper pendant plusieurs semaines le ministère de l’Enseignement supérieur. Face à la pression, les autorités avaient finalement procédé à des recrutements supplémentaires et proposé des solutions alternatives, comme les remplacements numériques.
Une mobilisation qui dépasse le Grand-Nord
Si les ressortissants du Grand-Nord sont les seuls à s’être officiellement organisés pour dénoncer ces pratiques, ils ne sont pas les seuls à se sentir lésés. « Ils ont peut-être leur façon de poser collectivement leurs problèmes, mais c’est une affaire qui concerne tout le pays », souligne un autre candidat recalé.
La marche du 21 février s’annonce donc comme un moment clé pour les candidats frustrés, qui espèrent ainsi interpeller les autorités et obtenir des réponses concrètes. Reste à savoir si cette mobilisation parviendra à infléchir la position du gouvernement et à rétablir un semblant de justice dans ce processus de recrutement hautement contesté.