Le pays peine toujours à divulguer les contrats du secteur extractif, conformément à l’exigence 2.8 de l’initiative pour la transparence dans les industries extractives.
En matière de transparence dans l’exploitation de son sous-sol, le Cameroun est un mauvais élève. C’est du moins, ce qui ressort du diagnostic fait par “Publish what you pay”, [une association qui soutient les défis de l’initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE)] , le 15 septembre dernier lors d’une conférence de presse à Yaoundé.
Le pays de Paul Biya refuse, conformément à l’exigence 2.8 de la norme ITIE, de divulguer les contrats signés, ou les licences octroyées à ses partenaires, concernant l’exploitation de pétrole de gaz et de minéraux ainsi que les documents qui s’y rapportent. Le dernier cas en date est l’opacité qui a entouré la publication du permis d’exploitation du minerais de fer de Lobé à Kribi, Signé le 1er juillet 2022.
Ledit permis, attribué à la société Sinosteel Cam SA, longtemps gardé secret, a été finalement publié après une levée de boucliers de la société civile et des médias entre autres.
Pourtant, indique le président de Transparency International Cameroun, Me Henri Njoh Manga, “la divulgation des contrats est un engagement pris par l’état du Cameroun, en tant que membre de L’ITIE. Si le pays honorait ses engagements, le débat ne se poserait pas. L’ITIE est la certification de la bonne gouvernance dans les industries extractives dans le monde. Le Cameroun a librement adhéré à cet instrument international. Il doit alors respecter ses engagements”.
La norme ITIE, impose aux pays membres de divulguer systématiquement tous les nouveaux contrats signés et les nouvelles licences octroyées à partir du 1er janvier 2021, ainsi que les modifications apportées après cette date au contrat signé et aux licences octroyées précédemment. Selon Bernard Dogmo, du secrétariat technique de publish what you pay-Cameroun la divulgation des contrats a plusieurs avantages. Elle constitue un puissant antidote à la corruption dans les pays riches en ressources. La transparence en matière contractuelle permet aux parties prenantes, de comprendre les conditions dans lesquelles les ressources pétrolières; gazières et minière sont exploitées. En outre, les communautés touchées par les opérations extractives, peuvent avoir une idée sur les revenus qui leur seront versés par les entreprises.
Bien plus, les communautés peuvent connaître la nature des subventions et des incitations fiscales, accordées aux entreprises. Il en est de même pour ce qui est de la protection des communautés et de l’environnement entre autres. En ce qui concerne l’Etat, la divulgation des contrats a pour effet d’inciter les responsables gouvernementaux à conclure des contrats équitables avec des entreprises, rédigés en termes conformes au droit national. Le fait, indique t-on, de savoir que les contrats seront des documents publics, a un effet dissuasif. En clair, les fonctionnaires sont moins enclins à conclure des marchés désavantageux, ou à rechercher un enrichissement personnel illicite.
Transparence
Pour les entreprises, la divulgation des contrats leur permet de prouver plus facilement qu’elles honorent leurs obligations financières et sociales; ce qui contribue à limiter les risques concernant leur réputation. La transparence incite également au dialogue, à l’instauration d’échanges ouverts et fondés sur des éléments factuels; ce qui ne peut que renforcer la confiance, réduire les conflits et légitimer la licence sociale d’exploitation d’une entreprise entre autres.
Rappelons que le Cameroun a été temporairement suspendu de L’ITIE, le 1er avril 2021 pour non publication du rapport de 2018 de cette initiative, au délai de rigueur donné par l’organisation internationale basée en Norvège. La prochaine réévaluation est prévue en octobre 2023. Le Cameroun est devenu membre de l’ITIE en 2005 deux ans seulement après la création en 2003 de cet instrument.
Source : Mutations Édition du lundi 19 septembre 2022.